Que devient Youssouf Fofana ?
On se souvient comment celui-ci, à la tête d’une bande de "sauvageons" qui s’était fait une spécialité dans la banlieue parisienne des enlèvements contre rançon, une pratique devenue malheureusement tout à fait commune dans n’importe quel pays du tiers-monde, avait été, dans les circonstances toutes particulières de l’assassinat d’Ilan Halimi, identifié dans de remarquables délais, arrêté en Côte d’Ivoire, puis extradé en France. Il a été depuis placé en détention pour de longs mois, en l’attente de l’ouverture de son procès, lequel sera, n’en doutons pas, largement médiatisé. Dans l’opinion publique, Ilan était entre temps devenu un symbole, celui du jeune homme innocent, victime, en tant que juif, de toute cette prétendue nouvelle haine antisémite qui court dans les banlieues de nos villes. Et son assassin présumé, chef du "gang des barbares", devenait logiquement le symbole de la pire barbarie qui croît sur notre sol, celle qui n’hésiterait plus désormais à se dresser ouvertement, ne reculerait même plus devant les pires violences à son encontre, contre une communauté présente en France depuis des siècles, parfaitement intégrée, et qui n’aspirerait à rien d’autre qu’à vivre en paix sur le territoire.
Seulement, la situation réelle est loin d’être aussi simple : en dépit des pressions des autorités françaises, de celles exercées sur le gouvernement ivoirien par son homologue israélien, des déclarations publiques de Ruth Halimi, la mère d’Ilan, du soutien qui lui a été apporté par Roger Cukiermann, au nom du CRIF, et par toutes les associations communautaires, Youssouf Fofana persiste depuis toujours à nier la moindre motivation antisémite dans l’assassinat d’Ilan. C’était un crime crapuleux, et rien d’autre, soutient-il. Il croyait simplement, a-t-il expliqué aux enquêteurs, qu’Ilan, parce qu’il était juif, appartenait à une famille qui avait de l’argent. Comment les faits pourraient-ils lui donner tort ? La procureure l’ayant condamné d’avance, au nom de sa communauté, et avant même qu’il soit jugé, voulait que la loi Lellouche puisse être appliquée dans toute sa sévérité. Malheureusement pour elle, le prévenu s’obstine depuis le début à nier tout antisémitisme. Alors, que faire, sinon attendre ? Différer l’ouverture du procès. Et multiplier en attendant tous les gestes d’apaisement à l’égard de l’autre.
Depuis, d’autres faits d’actualité ont fait passer l’affaire Halimi au second plan des mémoires. Il y a eu cette démonstration de force, en plein quartier juif du Sentier, de la part de la "Tribu Ka", dont les membres se sont depuis exposés à la fois aux poursuites pénales et à la vindicte populaire. Il y a eu aussi ces initiatives inconsidérées d’un Nicolas Sarkozy, dont les plus récentes déclarations à propos des étrangers, après ces mots malheureux de "Karsher" et de "racaille", comme faits exprès pour rallumer la haine dans les banlieues, vont très prochainement aboutir à la régularisation de la situation administrative de milliers de sans-papiers et de clandestins, ces pères et mères de famille que nous côtoyons chaque jour dans les villes, soit au résultat exactement inverse de celui qu’on préconisait. Il y a toutes ces tentatives de séduction opérées par les politiques, en vue des Présidentielles de 2007, auprès d’une communauté de préférence à l’autre, sous le seul prétexte de l’influence grandissante qu’elle exerce dans la société. Et en ce moment, il y a surtout le football... Cette équipe "black-black-black", que nos gouvernants s’obstinent à présenter aux Français comme si elle était encore "black-blanc-beur", à défaut de "blanc-blanc-blanc", comme si elle était toujours à l’image du pays, de la France réelle, avec l’espoir inavoué de détourner les passions dans les cités, de faire croire à l’unité retrouvée du pays, par une victoire en finale de l’équipe de France contre l’Italie... On sait que la France n’avait pas hésité précédemment à acheter l’équipe nationale du Togo, contre la promesse de l’annulation d’une partie de la dette extérieure du pays. Contre le Portugal, chacun pouvait voir ces tirs au but prétendument ratés qui ne laissaient plus subsister le moindre doute quant à la réelle motivation des joueurs portugais. Et dimanche, qu’est-ce que ce sera, contre l’Italie ?
La leçon des faits, c’est qu’on n’achète certainement pas la paix dans les banlieues en dressant des Français, à l’initiative d’une communauté qui apprécierait tout particulièrement qu’il en soit ainsi, contre une autre communauté, sous le seul prétexte que la première, quoique numériquement très inférieure à la seconde, serait en position de force au sein de la société... Demain, Sarkozy deviendra peut-être le prochain Président de la République. Cela ne fera certainement pas oublier tous les agissements de sa communauté pour conquérir le pouvoir politique et s’y maintenir durablement, n’hésitant pas pour ce faire à se servir de la haine suscitée contre cette autre communauté, peut-être depuis moins longtemps présente en France, économiquement et socialement moins favorisée, mais pour laquelle le seul facteur démographique témoigne qu’elle représente bel et bien l’avenir du pays.
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